Notre rapport à la nature

L’histoire de l’être humain est jalonnée de tentatives pour échapper aux réalités naturelles. Tandis que certains cherchent à abolir la souffrance, la maladie ou la mort, à libérer l’esprit en emmurant le corps, d’autres inventent et pétrissent la matière en rêvant un jour de pouvoir la soumettre définitivement.
Aujourd’hui, nous prenons un cachet lorsque notre corps nous dérange, nous tournons un robinet pour obtenir de l’eau ou un bouton de thermostat pour rester bien au chaud. Pour ceux qui ont la chance d’en profiter, le monde contemporain, en mettant de la distance entre la nature et les besoins quotidiens, permet de vivre dans un confort inégalé. Mais il n’en a pas toujours été ainsi. Il fut un temps ou comprendre le fonctionnement de la nature tenait de la survie, ou du moins d’une vie un minimum supportable. Et si cela apparait moins évident à présent, l’essence de notre condition humaine n’a pas changé, et oublier ce que nous sommes en réalité nous expose à bien des déséquilibres.

Qu’on le veuille ou non, nous sommes donc profondément dépendants de la nature et de son fonctionnement, et aucune invention ne peut se vanter de pouvoir s’en passer, qu’il s’agisse de matière, des atomes aux plus hautes tours, ou des lois selon lesquelles elle s’exprime.
L’oublier n’est pas sans conséquences. Derrière l’illusion de la distance qui donne à penser que nous pouvons lui échapper, nous ne faisons qu’étouffer un peu plus ce que nous sommes, et par là toute possibilité de nous construire véritablement. En dirigeant notre recherche de bonheur vers des solutions matérielles et extérieures de plus en plus sophistiquées, nous en occultons d’autant plus la racine : le bonheur dépend de la compréhension et du juste rapport aux forces intérieures qui nous animent.

Une dépendance vertueuse.
Mais cette dépendance naturelle qui fait de nous des êtres vivants est loin d’être un mauvaise chose. Au contraire, c’est l’existence de lois et de limites, physiques et spirituelles, qui donne à la vie une structure pour exister et évoluer. C’est au moment où nous comprenons cela et commençons à prendre les leçons de la nature que commence le début de la vraie aventure humaine. Car, ce qui nous différencie des autres êtres vivants, c’est bien notre capacité à comprendre le fonctionnement de notre propre nature, et à nous servir de ce savoir pour évoluer vers des formes de vie de plus en plus raffinées.
Apprendre de la nature.
L’observation de la nature dans son mouvement de vie est certainement une des caractéristiques principales de la pensée orientale. En Chine, depuis des millénaires, se construisent des modèles qui épousent avec autant de finesse que de sagesse les lois du vivant. Elles sont au coeur tant du corps, dans les pratiques martiales et de santé (kung-fu, taï-chi, chi-kung, acupuncture, diététique, massages…), que de l’esprit (taoïsme, bouddhisme, shintoïsme…). Ces pratiques ont depuis longtemps fait leurs preuves, et guidé bien des êtres humains en quête de vitalité, d’efficacité ou de sagesse.

Il est facile de comprendre et de ressentir le principe du yin et du yang, et je vous invite à vous en laisser pénétrer au quotidien avec ces quelques exemples d’ouverture : inspir et expir, travail et repos, donner et recevoir, parler et écouter, faire et laisser faire… Que seraient l’un sans l’autre ? On appréciera également la cohérence de cette pensée à la lumière de la science moderne : théorie du big bang (contraction, expansion), physique quantique (matière et énergie dans un seul continuum). Et sur le plan économique encore, on comprendra en observant la nature que tout système économique prônant une croissance sans phase de contraction est voué aux plus grands déséquilibres.
L’hiver, qui nous occupe dans cet article, est yin bien sûr. Extrême. Froid, silencieux et lourd. L’hiver condense les choses à l’intérieur et sous la terre.
L’hiver est l’élément eau.





Ainsi, la dynamique de l’eau, qui correspond à l’hiver, c’est la pesanteur, la fluidité, le repos et la solution

Il y a beaucoup de raisons de s’intéresser à l’eau. Sans cet élément fondateur et omniprésent, la vie serait tout simplement impossible. En médecine Chinoise, l’eau est associée à l’hiver dont elle incarne les dimensions de pénétration et de restauration des forces profondes.

L’hiver, nous digérons nos expériences.
Le temps du laisser-faire.

Résumons-nous !




Recommandations :
- Privilégier la lenteur, le calme, le silence (le son est la nourriture des Reins), les soirées au coin du feu et les longues nuits… Tout ce qui nous tourne vers l’intérieur, comme la lecture ou la méditation.
- Modérer l’activité physique (y compris sexuelle, en lien avec les Reins également) et les situations de stress.
- Garder la chaleur, particulièrement au niveau des pieds, de la tête, des Reins et du bas-ventre.
- Manger chaud et en relation avec la saison : légumes racines, légumineuses, fruits de mer, gingembre, poivre, ail…
- Pourquoi ne pas savourer un bain avec quelques huiles essentielles bien choisies, une bougie, un bon livre, en laissant fondre le temps et le corps dans l’élément eau ?
- De nombreux exercices permettent de nourrir les Reins : l’étirement eau du Makko-ho, la posture de la montagne en Chi-Kung… Réchauffez bien le bas-ventre et le bas du dos.
- Plutôt que de vous lancer dans de nouveaux projets, dans l’action et le faire, profitez-en pour prendre du recul et laissez faire. Laissez couler l’eau en vous et acceptez la pesanteur, sans culpabilité. Observez la direction que prend votre vie. Est-ce que les choses que vous avez entreprises vous ont apporté de la joie et vous rapprochent de vos objectifs les plus intimes ?
